I.1.1. Coloscopie et iléoscopie

Dr Ana Echarri Piudo
Complejo Hospitalario Universitario de Ferrol

INTRODUCTION

La réalisation d’un examen complet du côlon et de l’iléon terminal constitue l’une des pierres angulaires du diagnostic et du suivi des maladies inflammatoires.
La conception du coloscope est similaire à celle du gastroscope, bien que beaucoup plus longue, plus large et plus flexible. Le canal de travail du coloscope se trouve à la position 5-6 heures (dans le gastroscope, la position est à 7 heures). Le tube d’insertion du coloscope a une section terminale qui se plie facilement, ce qui lui permet de glisser dans les coudes du côlon. Sa flexibilité facilite la formation des boucles qui se produisent invariablement à tout moment pendant la technique et qui, si l’on utilisait un tube rigide, créeraient des conditions impliquant un étirement plus important du côlon et du mésentère, augmentant ainsi la douleur et les complications1,2.

Les coloscopes standard ont un tube d’insertion d’un diamètre externe de 1,3 à 1,5 cm et un canal de travail de 3,8 cm. Pour certaines situations, des modèles spéciaux sont disponibles comme le coloscope pédiatrique, avec un tube d’insertion de 10 mm et un canal de travail de 3,2 cm, qui peut permettre le passage d’un sigmoïde difficile (diverticulose, chirurgie pelvienne) ou le passage d’une sténose. Le coloscope thérapeutique, avec un canal de travail de 4,2 mm, est utile pour la pose de prothèses et le coloscope à double canal (avec au moins un grand canal) permet l’insertion simultanée de deux matériels de travail (Fig. 1). Il existe des coloscopes longs de 160 à 170 cm qui facilitent une intubation cæcale plus redondante dans le côlon, en plus des coloscopes intermédiaires de 130 cm. L’apparition de coloscopes à rigidité et flexibilité variables sous la tête de commande permet d’utiliser le coloscope sans rigidité (mode flexible) pour négocier les angulations ou avec une augmentation de la rigidité pour éviter les boucles récurrentes1,3.

INSUFFLATION AU DIOXYDE DE CARBONE VERSUS AIR

Pendant l’insertion et surtout pendant le retrait, une distension adéquate est importante. Actuellement, il existe des systèmes de CO2 à basse pression et à débit contrôlé qui présentent des avantages, principalement en ce qui concerne la vitesse d’absorption du CO2 (100 fois plus rapide que l’air), qui élimine par les poumons 15 à 20 minutes après avoir terminé l’examen avec plus de confort pour le patient et une récupération plus facile3..

Principes généraux

1. Fondamentalement, utiliser la roue rotative combinée à de petites rotations dans le sens des aiguilles d’une montre et dans le sens inverse des aiguilles d’une montre du tube d’insertion pour permettre l’insertion dans les angles et maximiser la force d’insertion vers la pointe.
2. Utiliser le moins possible la commande d’angulation latérale (principalement dans la méthode de coloscopie à commande à une main), et juste des ajustements de rotation mineurs lorsque cela est nécessaire.
3. Ne pas trop insuffler pendant l’insertion.
4. Faire des mouvements de retrait fréquents pour maintenir le tube droit, avec une longueur adéquate pour chaque localisation (40 cm dans le côlon descendant, 50 cm dans la flexion splénique, 60 cm dans le transverse moyen et 70-80 cm dans le caecum).
5. Utiliser une sédation légère et maximiser l’angle de vue avec les changements de position.
6. Répondre aux plaintes du patient lors du retrait du tube et de l’aspiration d’air.
7. Si l’extrémité n’avance pas, essayer différentes combinaisons de changements de position, de pression manuelle et de petites rotations du tube. Envisager un changement d’endoscope.
8. Pendant l’insertion, pousser lentement à travers une boucle peut être un dernier recours. N’oubliez pas de redresser l’endoscope une fois passé dans la boucle 2-4.

Section de contrôle

La tête de l’endoscope ou section de contrôle a été conçue pour être gérée à deux mains (Fig. 2) :
– La main gauche tient la tête et le pouce gauche effectue des mouvements de haut en bas avec le contrôle de position.
– La main droite contrôle la roue de contrôle latérale.

Un examen correct nécessite une manipulation coordonnée des roues de direction et du tube d’insertion, c’est pourquoi de nombreux endoscopistes préfèrent la commande à une seule main (Fig. 3). Dans une technique à une main, le pouce contrôle les deux roues rotatives avec l’aide du majeur. La main droite contrôle le tube d’insertion, en le tenant à 25-30 cm de l’anus, ce qui permet une insertion plus douce en appliquant une rotation plus efficace.

Préparation du patient

L’endoscopiste prendra en compte les aspects essentiels et généraux de toutes les procédures, tels que le consentement éclairé du patient ou la sédation pour la réalisation du test, qui ne sont pas inclus dans ce livre5.
Le patient recevra des instructions sur les recommandations diététiques (pas de résidus 48 heures avant le test et des liquides la veille), notamment en buvant beaucoup de liquides et en administrant diverses solutions de nettoyage du côlon (polyéthylène glycol, sels de magnésium, solutions de phosphate de sodium ou lavements). Il convient d’interrompre le traitement par fer 3 jours avant le test. Le patient doit être à jeun.

Technique

La position la plus adéquate pour commencer l’examen est celle du patient placé en décubitus latéral gauche, les cuisses fléchies et le genou droit reposant devant le gauche.

1. L’insertion commence par un toucher rectal qui, outre l’évaluation d’une éventuelle maladie anale, permet l’insertion du coloscope lubrifié dans le canal anal, l’introduisant jusqu’à l’ampoule rectale où, avec une insufflation et une légère traction en arrière du coloscope, on retrouve la lumière rectale. Étant donné sa capacité, le rectum peut être difficile à examiner, c’est pourquoi il est parfois nécessaire d’effectuer la manœuvre de rétroversion en appliquant une angulation maximale vers le haut à l’endoscope pendant son insertion. Avec l’endoscope en rétroversion, la roue latérale et la rotation de l’endoscope permettent une vue à 360º du rectum distal. Il est généralement facile de faire passer l’endoscope dans le rectum (15 cm) et d’éviter les valves de Houston. Il faut essayer d’insuffler le moins d’air possible.

2. Le côlon sigmoïde se caractérise par son élasticité et peut atteindre 40-70 cm lors de l’insertion. Une fois le tube redressé, le sigmoïde ne mesure plus que 30-35 cm, d’où l’importance d’évaluer les lésions lors de l’insertion, pour éviter qu’elles ne soient pas repérées lors du retrait. L’insertion est permise par un mouvement de rotation en « tire-bouchon » avec l’extrémité de l’endoscope légèrement courbée. En cas de diverticulose, l’insertion doit être effectuée avec une extrême prudence, en se rappelant que la direction de la lumière est généralement perpendiculaire à l’ouverture diverticulaire. Parfois, dans un très grand sigmoïde, une augmentation de la rigidité, si une rigidité variable est disponible, facilite le passage (Fig. 4). La morphologie de l’anse sigmoïde avec une base d’insertion en « V inversé » permet des mouvements de rotation au-dessus d’elle, causant des problèmes d’insertion avec une fréquence relative. Une bonne technique de passage de l’anse sigmoïde et de la jonction sigmoïde-côlon descendant facilite la réalisation complète de la coloscopie.

3. Pour passer la jonction sigmoïde-côlon descendant, il est important de redresser le coloscope et l’aspiration, et l’application d’une pression abdominale dans l’hypogastre est utile. La progression du rectum, dans la partie postérieure du bassin, vers le sigmoïde situé à la cavité abdominale antérieure et à nouveau vers la zone rétropéritonéale (côlon descendant) crée un mouvement en spirale appelé « boucle en N ». L’introduction forcée de la sonde augmente la boucle, tandis que le retrait avec l’endoscope en rotation dans le sens des aiguilles d’une montre tend à la réduire et à faciliter la progression. Si l’on introduit un coloscope trop long dans le sigmoïde, il produit généralement une boucle qui facilite le passage de l’extrémité de l’endoscope. Dans ces cas, il est préférable de continuer à avancer jusqu’à 90 cm, ce qui correspond généralement à la flexure splénique. En ce sens, redresser le tube en le tirant en arrière et en maintenant la rotation dans le sens des aiguilles d’une montre permet son avancée.

4. En général, et en raison de la fixation rétropéritonéale, le passage dans le côlon descendant est habituellement facile. Si le coloscope est redressé, un contrôle attentif des mouvements d’introduction, de l’aspiration et des rotations de l’extrémité distale facilite le passage vers le côlon transverse. En général, avec un tube redressé, la distance entre l’anus et la flexion splénique est de 50 cm, la persistance de boucles ou d’anneaux étant la principale cause de difficulté lors de l’insertion. Il faut éviter une angulation excessive de l’extrémité et la succion, pour laquelle une pression abdominale, une petite rotation du tube dans le sens des aiguilles d’une montre ou un changement de posture peuvent être utiles. Le passage du côlon transverse avec sa morphologie triangulaire est généralement facile, sauf en cas de laxité abdominale, auquel cas la compression manuelle de la zone épigastrique peut être d’une grande aide.

5. Pour passer sur la flexion hépatique, il est à nouveau indispensable de redresser le tube (70-80 cm de long à partir de l’anus). Généralement, il faut faire une sorte de double rotation, d’abord à droite, selon le champ de vision (oblique vers l’arrière dans le tube digestif), puis à gauche (oblique vers l’avant). Lors de son passage, l’air doit être aspiré pour permettre la progression. Une fois l’extrémité supérieure du cæcum (valvule iléocæcale) franchie, il faut insuffler pour le distendre. La reconnaissance de l’orifice appendiculaire, et parfois des trois taenias longitudinaux qui convergent autour de lui, confirme l’arrivée au fond cæcal. Le retrait de l’extrémité de l’endoscope permet l’exploration de la valve et on observera sur le bord proximal les encoches typiques qui indiquent la zone orificielle.

6. L’exploration iléale est nécessaire chez les patients suspects de maladie de Crohn, que la valve soit atteinte ou non. Le taux d’intubation iléale varie entre 74 et 100 % entre des mains expertes. L’expérience de l’endoscopiste et l’aspect valvulaire sont les deux seules variables indépendantes liées à la canulation iléale. Le positionnement correct du coloscope dans la région iléocæcale est une étape essentielle de la canulation, basée sur le redressement général du coloscope (Fig. 5). Avec le patient en position couchée, la valve est représentée à 9 heures, il est donc recommandé de plier l’endoscope en arrière afin de séparer la lèvre inférieure et de faire tourner le tube dans le sens inverse des aiguilles d’une montre, ce qui est déterminé par la rotation de la main et du corps vers la gauche. Avec le patient en décubitus latéral gauche, la position valvulaire est située entre 6 et 7 heures, avec des mouvements de canulation similaires. Si la valve est située dans le sens des aiguilles d’une montre entre 12 et 1 heure, la canulation sera possible en combinant la flexion de l’endoscope vers le haut et la rotation du tube vers la droite. En cas de valves à lèvres très fines, la rétroversion de l’endoscope dans la région caecale peut aider à les identifier. Dans ce cas, l’endoscope est retiré pour redresser l’extrémité avant que l’endoscope ne pénètre dans l’iléon. Une fois que l’endoscope y est, il est important d’insuffler afin de positionner le tube et d’éviter de le retirer du cæcum.

7. Aucune exploration endoscopique ne peut être conclue sans un contrôle approfondi du retrait : l’endoscope doit revenir par le courant péristaltique, l’insufflation est contrôlée et le dispositif est redressé. Généralement, pendant le processus de retrait, des biopsies ou des procédures thérapeutiques non programmées sont effectuées1,2,4,6,7.

1. Waye J, Rex D, Williams C, éditeurs. The colonoscope Insertion Tube, in Colonoscopy. Principles and Practice : Blackwell Publishing ; 2003.
2. Cotton P, Williams C, éditeurs. Colonosocopie et sigmoïdoscopie flexible, in Practical Gastrointestinal Endoscopy. The fundamentals. : Blackwell Publishing ; 2003.
3. Classen M, Tytgat G, Lightdale C, éditeurs. Colonoscopie : Instrumentation et technique de base en endoscopie gastro-entérologique. Stuttgart : Thieme ; 2010.
4. Waye J, Rex D, Williams C, éditeurs. Basic Procedure : Technique d’insertion en coloscopie. Principles and Practice : Blackwell Publishing ; 2003.
5. Cotton P, éditeur. Sedation, analgesia and monitoring for endoscopy, in Advanced Digestive Endoscopy : Practice and Safety. : Blackwell Publishing ; 2008.
6. Trecca A, éditeur. Ileoscopie terminale : Technique. Dans Ileoscopy. Technique, diagnostic et applications cliniques. Rome : Springer ; 2012.
7. Trecca A, éditeur. L’importance de la coloscopie complète et de l’exploration de la région cæcale In Ileoscopy. Technique, diagnostic et applications cliniques. Rome : Springer ; 2012.

Laisser un commentaire